Mai :: Palace Carter



Il avait regagné la demeure familiale. Celle de ses enfants. Qu’il eût laissé à Greygarde pour assure leur éducation. Mason et Alice étaient aux mains de tuteurs droits et fermes, aptes à leur prodiguer déjà les bases d’un entraînement martial. Tandis que Roy suivait déjà celle avancée. Auprès des meilleurs maîtres d’arme du royaume. C’est du moins ce qu’avait sous-entendu Artorias lors de leurs quelques rencontres. Il fallait avouer que sur ce point, il ressemblait plus qu’il ne souhaitait l’admettre au roi du pays. Tous deux bercés par une éducation violente et intransigeante.

La seule chose qu’il avait à léguer à ses enfants. Avec la promesse d’une gloire et d’une renommée inégalée. Accompagné du pouvoir pour être en mesure de s’en emparer. Voilà ce qu’était Roy. Premier née. Parfait prototype de la volonté des Carter à toujours se surpasser. A toujours régner davantage. Un produit fait pour être empereur. Un enfant né dans le seul but de remplacer les dieux eux-mêmes.

Il savait son fils de retour en fin de semaine. Il s’était assuré que son agenda lui laisse donc quelques jours de libertés. Tempelhelm pouvait bien survivre sans son roi quelques jours. C’est ce qu’il aimait faire croire et penser. C’est ce qu’il aimait imaginer. Son nouveau petit royaume. Qu’il façonnait petit à petit à son image.

S’était fait annoncer à l’avance. Il l’avait convié dans le gymnase de leur petit palace situé dans la capitale. Plus une maison de fonction qu’une réelle demeure familiale. Mais c’était bien plus que suffisant pour des personnes de leur rang. Un Carter ne pouvait se contenter d’un espace commun. A l’image du reste du monde. Ils ne pouvaient tolérer être considérés comme des gens normaux. Ils devaient sortir de l’ordinaire. Que ce soit en bien ou en mal.

Laissant tomber son long manteau à l’entrée même de la salle. N’ayant pas pris la peine de se changer au préalable. Il s’était directement mis en route vers le lieu du rendez-vous. Son temps était d’autant plus précieux que ses obligations étaient nombreuses.

Comment se passent tes cours fils.

Le ton était froid, distant, presque détaché. Il parlait avec un automatisme effrayant. Alors qu’il devait s’adresser à celui qui portait le même sang que lui. Au produit de sa propre chair. Il ne faisait qu’énoncer des faits. Sur un ton bien trop robotique pour être réellement intéressé par ladite réponse qu’il pourrait déjà lui fournir.

Des progressions à me signaler ?

Il ne s’atterdait pas en félications ou en louanges. Il ne savait pas faire. Il n’en avait jamais reçu. Il n’avait donc rien à offrir en retour. Il n’était capable de montrer son affection qu’à l’importance qu’il consacre à rendre sa vie infernale.

Ta t ante veut encore te contacter. Sûrement qu’elle s’inquiète pour toi. Tu dois lui montrer que ses inquiétudes sont infondées. Que tu n’as nul besoin de ses considérations.

S’arrête devant lui. Droit. Le prenant de haut par sa carrure.

Tu n’es plus un enfant. Tu n’as plus le loisir de pleurnicher. J’espère que tu l’as bien compris après toutes ces années.

Mai :: Palace Carter



L’homme regarde les cicatrices de son fils avec un air satisfait. Bien content des résultats de cette éducation sur ce dernier. Persuadé qu’il n’y avait pas de meilleure école. Qu’à force de recevoir des coups, il finirait par être celui qui les rend. Avant d’être celui qui les donne. Il avait reçu le même traitement. Et à présent, il en était là aujourd’hui. A reconstruire cette ville. Ce royaume. Où il était roi. Où il deviendrait dieu. Couronné sur les cendres d’anciens mythes.

Se contente de l’observer en silence se préparer. Tandis qu’il lui offre des réponses à peine passables. Bien trop peu précise pour un homme aussi pointilleux que lui. Ian Carter est dans les détails. Moins on lui en offre. Plus il se montre méfiant.

Je vois. Je suis heureux de l’apprendre. C’est la moindre des choses après tout pour quelqu’un comme toi.

Penche la tête sur le côté. Observant son fils avec un air tout sauf neutre sur le visage.

Mais… Toi. Quel était ton classement dans cette compétition ? Je ne me souviens pas avoir demandé comment se portait ta classe. Mais toi. Quels sont donc les résultats de Roy Carter ? A titre individuel ?

Son regard se fait de plus en plus insistant. A mesure qu’il se pose sur ce dernier. Le prenant de haut une fois encore.

Dois-je me répéter. Fils. La question n’a pas été assez claire la première fois ?

Son poing craque dangereusement. Il n’avait nullement l’intention de s’en prendre à lui aujourd’hui. Sauf si ce dernier avait décidé de se montrer réticent. L’autorité était un point important dans l’éducation de tout Carter. Jusqu’à ce qu’il ait la force de l’imposer lui-même. Il se devait d’obéir sans sourciller à celle de son père.

Je me moque de ce que tu lui répondras. N’oublie pas qu’elle t’a abandonné Roy. Toi, ton frère et ta sœur. Elle a préféré partir rejoindre cette nation de fanatique. Plutôt que de rester auprès de sa famille.

Son ton était amer. Il ne cachait pas la déception et la colère qu’il ressentait face à ce choix. Qu’elle prenne partie pour Catharsis était une chose. Mais qu’elle refuse de le suivre. Lui. Plus que quiconque sur cette terre. C’était un affront qu’il avait encore en travers de la gorge.

Mai :: Palace Carter



Pour lui faire honneur. Et dire qu’il y croyait. Du haut de son air désabusé et de son sourire presque imperceptible. Il pensait vraiment lui faire honneur. Pauvre enfant qu’il n’était. Simple gamin incapable de grandir. Même après avoir traversé autant d’épreuves. Il est toujours aussi fragile à ses yeux. Toujours aussi jeune. Toujours aussi faible. Et il ose dire à haute voix sa place dans l’école. Comme s’il s’agissait d’une fierté. Comme si son père devait être fier d’un tel résultat. D’une telle honte. Honte à son propre sang, honte à son rang, honte à sa propre personne. Comment pouvait-il se complaire dans une telle médiocrité ? Cette simple notion lui était incompréhensible. Inimaginable.

Et c’est ainsi que tu comptes faire honneur à ton père ? A ta famille ? Aux Carter ? Troisième ?

Sa langue claque violemment dans sa bouche. Tandis que son ton se fait plus grave. On aurait juré entendre un éclair gronder au loin.

SILENCE.

Hurlant presque dans le gymnase. Sa voix raisonne entre les murs. Mettant fin à ses explications. A ses justifications. La première étape vers le chemin de la défaite. Les vainqueurs n’ont nul besoin de se justifier.

Il se rue immédiatement vers lui. L’attrapant par le col sans sommation. Le trainant derrière lui. Avant de le lancer à même le sol. Son pied vient écraser le corps de son fils. Sur le bas du dos, où il avait déjà reçu des blessures. De quoi raviver une douleur qu’il n’aurait visiblement pas dû oublier.

Visiblement tu as oublié ce que je t’ai déjà dit. Le second. N’est que le premier des derniers. Tu penses que je vais me satisfaire d’une troisième place ? Tu penses que je vais être heureux de te voir fier PERDANT ?

Commence à mettre un peu de son poids dans sa poigne, écrasant davantage son corps sur le sol.

J’ai été trop doux avec toi. Bien trop doux. Je le savais. Je n’aurai pas dû te ménager. Malgré la mort d’Eden et de ta mère. Tu restes encore trop fragile.

Se penche vers lui. Lui hurlant presque à l’oreille.

TU VEUX ASSISTER ENCORE IMPUISSANT A LA MORT DE TA FAMILLE ? DE TES PROCHES ?? TU PENSES POUVOIR CHANGER QUOI QUE CE SOIT EN ETANT AUSSI PITOYABLE ?

D’abord la violence des mots. Avant d’employer la violence physique. A ses yeux, ce qu’il lui infligeait jusqu’à présent n’était encore qu’une mise en garde.

T’EN AS PAS ASSEZ D’ÊTRE UNE MERDE ? 3ème ? COMMENT OSES-TU ETRE HEUREUX D’UN TEL RESULTAT ?

Il vociférait sur lui. L’écrasant de tout son poids. Du poids de la déception.

Mai :: Palace Carter



Le regarde avec mépris. Sans pitié. Sans aucune once d’attendrissement. N’ayant envers lui aucune empathie. Il était faible. Bien trop faible. Il devait être fort. Bien plus fort. Il devait être à l’image qu’il avait de lui. Idéal. Parfait. Sans limite et sans aucune faille. Un Carter ultime. Produit d’une vision corrompu par des générations précédentes, se succédant avec cette même image en tête. Dans le seul but de créer celui capable de les surpasser eux-mêmes.

Voilà ce que devais être Roy. Un simple produit de l’imagination collective de toutes les générations de Carter. Un prototype enfin achevé. Idéal. Celui capable de renverser les dieux. Celui capable de faire trembler les fondements même de ce monde. Il devait régner. Sur tout. Sur tous.

Mais pour le moment. Il ne voyait qu’un enfant tremblant à ses pieds. En boule. Apeuré et effrayé. Implorant sa pitié. Pitié qu’il ne pouvait lui offrir. Ce n’est pas avec de la pitié qu’il pourra se surpasser. Lui et les autres. Ce n’est pas avec de la pitié qu’il ira jusqu’à gravir les plus hauts sommets. Persuadé que ce n’est qu’à force de fermeté, de dureté, d’intransigeance. Persuadé qu’à force de coup, de cris et de violence. Il pourra faire de lui l’arme qu’il était. Pour accomplir son seul but. La seule raison de sa venue au monde.

Voilà pourquoi il était né. Voilà pourquoi Roy Carter existait. Pour ce seul et unique but. Rien d’autre.

Des excuses. Encore et toujours des excuses. Souviens-toi de cette douleur. Je frappe aussi fort que tu es faible.

Se laisse à nouveau emporter par ses émotions, vociférant de nouvelles insultes à son égard. Laissant parler toute sa colère contre lui.

TU PENSES QUE LES FORTS SE ROULENT EN BOULE PAR TERRE ? TU PENSES QU’ON DEVIENT FORT EN ETANT SI PITOYABLE ?

Hurle de plus belle.

Ne te compare pas à moi. Tu n’es rien du tout. Qu’une petite merde bruyante rien de plus. Tu rampes comme un déchet et tu te rêves de devenir comme moi ? Commence par te tenir droit.

S’arrête dans sa foulée. En l’entendant rétorquer. Une rage sourde s’empare de plus belle de tout son corps. Il n’avait pas la force de se relever. Mais il avait encore assez de force dans la langue. Pour oser lui faire des reproches.

L’attrape par la gorge. Manque de l’étrangler tandis qu’il le relève. Qu’il le tient droit devant lui. Les pieds du jeune garçon ne touchent plus le sol. Tandis qu’il plante son regard dans les yeux de ce dernier.

Ta mère est morte comme elle a vécu. En me décevant jusqu’au bout. Tu comptes faire la même chose ? Ceux qui sont incapables de survivre par eux-mêmes ne méritent pas d’être sauvé. Tu veux que je te laisse crever Roy ? C’est ça que tu veux ? Je vais te lâcher dans la carrière non loin de la ville. Qui grouille d’infestés. Tu veux voir combien de temps tu survis ? Je suis sûr que tu ne passeras pas la première nuit.

Il parlait sans savoir. De la trahison dont elle avait fait preuve. Alors qu’il lui affait tout offert. Alors qu’il avait tout donné pour elle. Elle avait osé lever une arme contre lui. Elle ne méritait rien de plus que la mort. Et ce n’était que miséricorde de sa part de lui offrir ? La sauver ? Elle ne pouvait plus être sauvée. Elle ne souhaitait pas être sauvée.

Le tiens toujours par la gorge. Mais desserre à présent son emprise. Pour éviter qu’il ne tombe inconscient entre sa poigne.

Mai :: Palace Carter



Il ne comprenait que la force. Il le voyait bien. Ce n’est qu’à travers la force qu’ils arrivaient à communiqués. Qu’ils avaient toujours communiqués. Il n’y avait rien d’autre. Aucune autre façon de faire ou de parler. Aucun autre échange possible entre eux. Si ce n’est à travers ce cercle sans fin de violence.

Il n’avait jamais offert le moindre amour à son fils, la moindre preuve d’affection. La moindre sympathie. Jamais eu de reconnaissance ou de fierté. Lui-même n’en avait jamais reçu. Il ignorait comment en offrir. Si ce n’est passé sa vie à la rechercher. A courir après. Dans le vain espoir de le recevoir avant la fin.

Il n’y aura pas de prochaine fois Roy.

Le message était clair. Il ne laissait plus de place au doute. Plus de place à l’espoir. Seulement une promesse amère et acerbe. Seulement une promesse douloureuse. Plus d’échec, plus de faiblesse, plus le temps de grandir. Roy n’avait plus le temps. Il devait être un adulte aujourd’hui. Pas demain ni un autre jour.

Je ne tolérerai plus de tel résultat. Tu es prévenu. Lors de ma prochaine visite. Je veux te savoir premier. Au-dessus des autres. Tue si tu le dois. Frappe plus fort. Agis comme bon te semble. Mais ne reviens pas m’offrir une nouvelle déception.

Soupir avant de lâcher l’emprise qu’il avait sur lui. Le laissant retomber à ses pieds. A même le sol. Sans même lui laisser le temps de reprendre son souffle. Il se penche vers lui, lui murmurant à l’oreille.

Au prochain échec. Mason prendra ta place. Et tu pourras aller te faire bouffer par les infestés ou crever dans une des ruelles de la ville.

Son ton était calme, posé. Ce n’était plus une menace, mais une certitude à présent. Il n’y avait plus de place au doute.

Je suis sûr que Mason supportera mieux l’entraînement que toi. Il a déjà le mental pour.

A savoir, celui d’un enfant brisé qui n’avait pas eu le temps de grandir. Ayant vécu une fin du monde bien trop tôt.

Et dans le pire des cas…. Il me restera Alice.

Il l’avait attaqué sur tous les points, lui faisant comprendre que maintenant. Il ne portait plus seulement sa vie sur ses épaules. Mais celle de sa famille tout entière. De son frère et de sa sœur également.

S’il voulait leur éviter de vivre le même destin que lui. Il n’avait plus de choix possible.

Gagner. Seulement gagner. Encore et toujours. Par tous les moyens possibles.

Mai :: Palace Carter



C’est bien. Le regard qu’il lui lance. C’est exactement ça qu’il cherche. Qu’il se laisse porter par ses sentiments. Par cette frustration, par cette douleur, par cette peur, par cette crainte d’être abandonné. Qu’il se batte plus férocement, encore et encore. Jusqu’à ce qu’il atteigne des sommets que même lui n’aurait pas imaginé. Qu’il soit implacable, droit et fort. Qu’il soit à l’image du feu qui brûle en chaque Carter. Une flamme qui consume et dévore tout sur son passage.

Qu’il soit craint. Comme le prochain patriarche.  

Qu’il dirige la prochaine génération d’une main de fer. Qu’il transforme cette famille. Qu’il la rende encore plus fier. A les diriger d’une main de fer. Ses frères et sœurs. Qu’il soit le seul à pouvoir tout dominer. Comme son père l’avait fait avant lui.

Il crie de plus belle. Il s’empresse de répondre. Il ne pouvait pas perdre sa place. Il le savait, il avait fait en sorte qu’il le sache. Qu’il comprenne. Quel était son seul but dans ce monde. Le remplacer. Sans ce but. Il n’était plus rien. Plus son fils, plus un enfant, il n’était même plus un animal. Un simple outil dont on dispose librement.

Il ne vivait que pour servir ce dessein. Il ne vivait que pour prendre la place de son père. Comme il l’avait fait avant lui. Il ne vivait que pour être un Carter. Un authentique Carter. Qui fera subir la même chose à son fils. Dans l’espoir qu’il le rende fier. A travers la mort et l’au-delà.

La reconstruction est achevée. J’ai remis sur pied notre foyer. A nous. Les Carter. La tour Prime est prête. Bientôt. Nous pourrons rentrer.

Il se redresse. L’air de rien. S’éloignant comme si de rien était. Comme si les échanges qu’ils avaient eu ne sortaient nullement de l’ordinaire. Une banalité de plus. Un lundi comme les autres. Un simple quotidien monotone dans leur vie.

Je compte faire de Tempel un royaume. De quoi offrir un trône pour notre famille tout entière.

Trône sur lequel il sera amené à régner. Roy.

Mason et Alice viendront avec moi. Toi… Et bien. Tu sais ce qui t’attends si tu me déçois encore.

Lui lance un regard par-dessus son épaule. Affiche un sourire radieux. Leur discussion n’ayant déjà plus existé entre eux.

J’ai hâte de voir tes prochains résultats mon fils. Ils sont pour bientôt ?

Mai :: Palace Carter



Il l’écoutait à peine, s’étant éloigné vers les haltères. Il prit l’un des moyennes à une main. La levant comme on lève un sac de légumes. L’air de rien. Avant d’effectuer machinalement des mouvements avec cette dernière. Aussi loin qu’il s’en souvienne. Il s’était toujours entraîné. Aussi bien sur le plan physique. Que sur la maîtrise de son pouvoir. Sa vie tout entière n’a été qu’un long enchaînement de perfectionnement. Dur et rigoureux. Où la perfection ne devait pas être un objectif. Mais une rigueur.

Surtout dernièrement. Sa force forçait l’admiration. Il avait atteint des sommets de plus en plus hauts. Repoussant davantage ses limites. Il se sentait inarrêtable. Comme si aucun homme ou femme vivant ne pouvait encaisser ses coups. Et dire qu’il frappait son fils avec autant d’insouciance. A ses yeux. Il n’y avait pas de meilleure façon de le préparer. Plus il recevra de coup d’une telle force. Plus il saura y résister sur le long terme. Une logique imparable.

Tourne enfin la tête lorsque Roy lui annonce les dates des épreuves.

Sors vainqueur de toutes ces compétitions. Arrive premier au classement. Tout ça devrait être une évidence à tes yeux. Je ne devrais pas avoir à te le rappeler.

Sa voix raisonnait à présent à nouveau dans le gymnase tout entier. Ayant regagné son ton impérieux habituel. Il n’y avait plus de colère ni de ressentiment. Seulement des ordres adressés à cet enfant. Ironiquement. C’était là sa voix habituelle. Qu’il s’adresse à lui ou non. Une autre façon de se voir au sommet. Il donne des ordres. Les autres se contentent d’obéir.

Sa dernière question manque de lui arracher un sourire. Au lieu de cela. Il se fige. D’abord imperturbable. Il reste ainsi. Stoïque. Laissant planer entre eux un lourd silence. Qu’il brisera en lançant son poids aux pieds de Roy. Venant s’encastrer dans le sol.

Sa dernière menace.

Avant de demander quoi que ce soit. Tâche d’arriver premier. Les perdants n’ont pas leur mot à dire. Encore moins de demande à faire. Si tu gagnes, nous verrons.

Plonge son regard d’azur dans les yeux de son fils.

Si tu perds. Mason prend ta place.

Attrape une bouteille. Oubliant la menace directe qu’il venait de lui faire. Buvant une gorgé d’eau, d’une façon bien trop décontractée après un tel échange.

Et Alice ? Comment se passe son initiation ?

Elle était encore trop jeune pour qu’il s’en occupe personnellement. Mais il ne négligeait pas pour autant son enseignement. Roy le subissait déjà, Mason avait un aperçu de ce qui l’attendait. Alice. Ce n’était qu’une question de temps.

Mai :: Palace Carter



Évidemment qu’il avait raison. Il avait toujours raison. Quoi qu’il dise. Quoi que les autres pensent de lui. Il se retrouvait toujours à avoir raison. A dire une vérité, parfois malgré lui. Car il était incapable de se tromper. C’était là sa réelle malédiction. Celle de toujours être dans le vrai. De toujours comprendre et analyser les évènements qui l’entourent. Avec une précision parfois bien trop présente.

Bien. Très bien même. Elle doit se tenir prête. Au même titre que Mason. Elle pourra bientôt commencer l’apprentissage de base.

Il écoutait à peine la réponse de son fils. Le regard déjà ailleurs. Tandis qu’il repose les poids à leur place. Ce genre d’exercice arrivait à peine à le stimuler à présent. A force de le faire encore et toujours, quotidiennement. Il n’arrivait plus à satisfaire sa force devenue démesurée. Il avait atteint les sommets dans certains domaines. Il en était bien conscient. Et les sommets l’avaient lassé. Mais pourtant, il était bien incapable de s’arrêter à mi-chemin. Poursuivant encore et toujours sur cette lancée.

Maintenant plus que toujours. Tes frères et sœurs doivent être prêt. On ne sait jamais ce qui peut arriver demain.

Regard perçant, qui le traverse de part en part. Une façon de le prévenir aussi bien que de le menacer. Une façon de lui faire comprendre que sa place n’était pas acquise. Mais qu’elle devait se mériter jour après jour. Si lui en était incapable. Un autre viendra prendre sa suite. Et il en va de même pour son successeur.

C’était d’ailleurs tout le but de sa manœuvre. Il se doutait bien que les préparatifs allaient bon train. Il veillait personnellement à ce que ces derniers suivent une route exemplaire et régulière. Prêt à se débarrasser non seulement de ses enfants, mais également du personnel inapte. Il visait l’excellence, ne s’entourant que d’excellence. N’acceptant rien d’autre. Ni médiocrité ni inconstance. Les légendes ne se forgent pas seule. Elles le deviennent avec un travail acharné et régulier. Il était venu au monde pour la forger. Ses enfants devaient faire encore mieux. Bien mieux qu’une simple légende. Et si aucun mot n’est capable de définir leur exploit. Ils n’auront qu’à l’inventer. Repoussant sans arrêt les limites de cette famille.

Blâme ta tante. Amaya a beau s’inquiéter pour vous. Elle ne vient jamais vous voir. Si elle prend la décision de vous abandonner. C’est elle que ça regarde.

Il alimentait quotidiennement la culpabilité de cette dernière. Tout en inclinant la colère de ses enfants en direction d’elle. Peut-être qu’ainsi, elle finira un jour par craquer. C’était là la seule méthode qu’il avait trouvé. La seule méthode qu’il connaissait également.

La seule qui avait porté ses fruits au cours de sa vie. De son éducation. Celle qui l’avait façonné jusqu’ici.

Entraîne toi encore davantage. Tu en auras besoin.

S’éloigne déjà. En direction de la sortie du gymnase.

J’ai un entretien avec Artorias. Lors de ma prochaine visite. J’ose espérer avoir de bonnes nouvelles. N’est-ce-pas. Mon fils ?