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Je m’étais totalement abandonné à cette soirée. Perdant jusqu’à la moindre notion de la vie elle-même. N’ayant plus conscience du temps qui passe, qui s’écoule. N’ayant plus conscience de ce contact si chaud. Si brulant. N’ayant plus conscience de ces draps ou du canapés quittés. N’ayant plus conscience en ce souffle sur ma peau. Je m’étais totalement abandonné dans cette étreinte. Dans cet échange. Dans cette valse sans lendemain. Que ce dernier me semblait totalement irréel. Inatteignable. Comme si le monde pouvait s’arrêter en cet instant précis. Au creux de ses lèvres. Dans ce regard d’émeraude. Dans cette étreinte d’une éphémère éternité. C’était à présent mon monde et mon idéal. Tous les désirs et les émotions s’étaient mêlées pour ne former qu’un amas de sensations diverses. A la fois électrisant, à en bruler l’âme, qu’à une simple caresse frissonnante. Tout le reste pouvait disparaitre. Cesser d’exister.

Dans ce délire égoïste qui m’emporte loin des rives de la raison. Je m’y perds. Sur ces rivages bien trop idyllique pour être sain. Bien trop nécessaire pour s’y échapper. Bien trop entier pour ne pas y être comblé. Je ne pensais ni à l’or du soir qui tombe. Ni aux voiles qui se lèveront au loin dès l’aurore. Si ce n’est à ce corps sous mes yeux. Si ce n’est à ce désir palpable. Au creux de mes mains. Dans cette étreinte. Qui m’attache et m’y condamne. Prisonnier de mes propres chaînes. Je m’y abandonne sans retenue. A cette soirée. A cette prison d’éternité. Sans retour possible, sans regret envisageable. Si ce n’est la promesse d’un lendemain.

Lendemain qui arrive bien trop prompt. Plus prompt qu’à l’accoutumé. Il m’arrache un soupir rauque. Dans ces draps bien trop vide. Dans cette absence de bras, de sens, de senteur. Dans cette absence de tout. Dans ce vide qui consume à présent mon âme et mes désirs. Dans ce vide qui s’installe. Qui corrompt et qui doute. Dans cette promesse brisée. Celle des parjures qui n’ont rien d’autre qu’une nuit. Celle de ceux abandonné. Abandonné sur le chemin de l’envie. Abandonné sur le chemin de la déraison. Pour un prix que nul autre ne serait arboré. Avec plus de fierté. Plus de joie. Plus de bonheur. Que ceux qui ont tout perdu. Pour vivre un instant. Rien qu’un instant. Rien qu’un instant d’éternité. Qui vaut mille promesses. Qui vaut mille liens. Qui vaut mille volontés.

Mes bras viennent remuer les draps. Dans le vain espoir d’accrocher une chaleur familière. Dans la maigre tentative d’embrasser une nouvelle fois ce désir de la posséder. Une fois de plus. Rien qu’une éternité de plus. Davantage qu’un songe. Un rêve éveillé. A présent. Se dressait à mes yeux. Mais il n’y avait rien dans ces draps. Que les regrets du matin. Avare en émotion. Avare en sensation. N’offrant que solitudes et doutes. Bien loin des plaisirs et de la chaleur réconfortante d’un baiser. D’une caresse. Bien loin des frissons d’envies d’un souffle, d’un murmure. Bien loin de ce bras qui se cherchent et s’emprisonnent.

Dressé sur le lit. Le dos courbé. Les mains croisées. Dans ce vide qui m’inspire et me contraint. Le regard qui se perd une nouvelle fois dans la pièce. Dans on absence. Dans son vide. Dans ce vide laissé par son départ. Bien plus que je ne voulais l’admettre. Bien plus que ce creux ne voulait le montrer. Jusqu’à ce que le bruit familier de l’eau qui coule atteigne enfin mes sens endoloris. Après une nuit bien trop vive en émotions.

Le regard qui se tourne inconsciemment vers la salle de bain. A la recherche de la responsable. De tous mes maux et de tous mes bonheurs. A la recherche de celle qui m’a fait vivre. L’espace d’un instant. Tout un instant.

Tu n’es pas partie ? Etonnant, je ne pensais pas te revoir à mon réveil.

Un silence. Que je n’ose briser. De peur de trop en dire. Ou pas assez. De peur de succomber. Une dernière fois. Une fois de trop.

Non pas que ça me dérange.

Bien au contraire.

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Toujours assis sur ce lit. Dans ces draps, dans l’absence de ces bras. Le regard qui fixe un point imaginaire juste devant moi. Mes souvenirs se perdent encore dans cette éternité écoule. Dans ce temps passé. Dans cette nuit bien trop courte. Dans ce lendemain si froid. Alors qu’une vive chaleur résidait encore au creux de mes mains. Incapable de quitter mon corps. Incapable de l’oublier. Elle et ses lèvres. Tout était encore si vif, encore si réel. Qu’en fermant les yeux, mes pensées se perdaient au loin. Dans cette vague de sensations. Dans cet océan de plaisir. Où l’horizon n’avait plus de fin. Où tout n’était qu’un perpétuel commence. Qu’une nouvelle découverte. Qu’une nouvelle vision. Il n’y avait qu’eux. Il n’y avait que nous. Il n’y avait qu’elle.

Qu’elle et ses lèvres rouges. Qu’elle et ses caresses mortelles. Ses ongles sur le corps, arrachant à la fois mon âme et ma peau. S’incrustant au plus profond de ce cœur meurtris. De celui qui ne devait rien ressentir. Ou qui le ressens bien trop fort chaque soir. Se souffle sur ma nuque, cette chaleur qui remonte. Tout était encore bien trop vif. Bien trop ancré dans ma mémoire. Refusant de la quitter, refusant de l’abandonner. Si ce n’est par son manque. Par son absence. Par cette horrible sensation de vide à mes côtés.
Ce n’est qu’en entendant sa voix. Sa réponse. Que le regard s’éclaire de nouveau. Porté naturellement vers le son de cette dernière.

J’ai l’air d’être autre chose qu’un gentleman à tes yeux ?

Sourire qui se dessine machinalement sur les lèvres. Réagissant au trait d’humour, ou au simple son de sa voix.

Et son visage passe par l’encadrure de la porte. Apparait à nouveau dans ma vie. Cette mèche blonde qui se dessine, ce regard espiègle. Ce sourire provocateur et ses lèvres. Ses lèvres à se damner pour l’éternité.

Il est vrai… Qu’à la base je devais te ramener. J’avais presque oublié… ce détail.

Esprit songeur. Je me perds l’espace d’un bref instant de nouveaux dans mes pensées. L’idée de me séparer de la princesse n’était pas vraiment rentrer dans le spectre de mes possibilités jusqu’à présent. Comme un désir égoïste de profiter d’elle et de sa présence. Davantage. A l’excès. Bien au-delà du raisonnable. Au diable la raison et la modération. Je voulais à nouveau me replonger dans ces draps. Dans son étreinte. Dans ses bras. Dans son cou. Dans son corps.

Quittant enfin la douceur du lit. Je me redresse, étirant chacun de mes muscles, encore endolori par cette bien trop longue nuit mais trop courte soirée. Mes pas m’amènent tout naturellement vers la salle de bain. Là où elle s’était terrée. Face à ce miroir, tressant ses cheveux. Elle semble aussi bien loin, perdue dans sa tête.

J’en profite pour me glisser dans son dos. L’enroulé une nouvelle fois de mes bras. De peur de la voir disparaître à nouveau. De peur de la voir s’échapper une fois de plus. De peur de la voir se glisser hors de mon étreinte.

Très honnête. Et ce n’est pas pour me déplaire.

Rictus amusé. Alors que mes lèvres s’approchent timidement de sa nuque, soufflant sur cette dernière, dans un murmure.

Tu veux partir tout de suite ?

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L’honnêteté. Ironique venant d’un homme comme moi. Ironique venant de celui qui n’avait jamais réellement honnête dans sa vie. Si ce n’est face à son dieu. La seule entité dans ce monde à laquelle il ne pouvait pas mentir. Ou pas encore. Mais c’était une question que j’avais toujours soigneusement évité. Elle soulevait beaucoup d’interrogations. Beaucoup d’inquiétudes. Que les gens comme moi ne veulent pas affronter. J’ignorais si c’était une forme de lâcheté. Ou une forme débridée de liberté. Mais à choisir. Je préférai écouter mon instinct. Cette voix qui avait toujours raisonné au plus profond de mon âme, dans tous mon corps, jusque dans mon cœur. Vivre pour ses désirs. Vivre selon ses envies. Une philosophie simple et égoïste. La seule qui valait réellement la peine d’être vécu. Et peut-être ainsi avoir la chance de mourir d’un plaisir, pur et sans tâche. Que demander de plus ? Si ce n’est un dernier souffle. Un instant de folie.

Nos regards se croisent à nouveau. Et j’en viens à oublier tout le reste. Comme à chaque fois. Comme si toute cette philosophie n’avait pas d’importance. N’en avait jamais eu. Comme si elle était la seule chose qui comptait encore réellement. Comme si elle avait toujours été là. Comme si elle serait toujours là. Vivant hors du temps. Dans cette bulle chaotique et fragile. Mais qui pourtant avait tout d’un foyer. D’une douce demeure. A laquelle on se raccroche désespérément. Tout comme j’étais accroché à ses bras. Tout comme j’étais suspendu à chacun des mouvements de ses lèvres. Tout comme je respirais à travers ses soupirs.

Tu n’as toujours pas répondu à ma question.

Mes lèvres viennent chercher son cou par réflexe. Déposant une morsure fugace, avant de remonter le long de son visage. Humant son parfum tout entier, m’enivrant de son essence à l’excès. Jusqu’à venir lui murmure au creux des oreilles.

Au lieu de me poser plus de questions. Réponds d’abord à la mienne.

D’autant plus que je n’avais ni l’envie, ni la force de répondre aux siennes. Mon esprit était ailleurs, enfermé dans son regard. Cette pièce, cet immeuble pouvait s’effondrer, que rien d’autre n’avait d’importance. Qu’il tombe en ruine, ce monde, pour peu que je puisse savourer encore quelques secondes ses lèvres.

Si tu n’en as pas envie… Alors la réponse est toute trouvée. Ce n’est pas bon de se priver princesse.

La seule certitude que ces années m’ont apportée. La seule réponse que le monde a bien voulu m’offrir. La seule prière à laquelle Omni a daigné répondre. Se priver n’apportera rien d’autre que des regrets. Et je refuse de vivre une vie pavée de regrets.

Et je viens lui voler un nouveau baiser.

Pour partir sans regrets.

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Le monde avait cessé d’exister. Dans cet espace hors du temps. Plus rien d’autre n’avait d’importance. Si ce n’est ces pupilles sous mes yeux. Cette nuque à ma merci. Et cette chevelure d’or entre les doigts. Elle était mon seul désir. Ma seule envie. Sur le moment. En cet instant. Je pouvais cesser d’exister, pour peu que cet instant dure éternellement. Il n’y avait pas plus humain. Que vivre pour succomber à son instinct. A ce désir viscéral qui nous anime. La volonté de résister. La volonté de lutter. La volonté d’être droit et fier. Tout ceci n’était que futiles tentatives. Vains espoirs d’aller à l’encontre même de la nature humaine. Sans désir, la vie est fade. Sans tentation, elle n’est qu’ennuie. Et à quoi bon vivre dans un tel monde. Privé de tout. Privé de chaque petite étincelle susceptible d’embraser notre âme. Une question futile. Que je n’avais jamais pris la peine de poser.

La raison et la logique n’étaient que des fardeaux. Que des chaînes. Auxquelles nul ne pourrait me lier. Je vivais pour vivre. Non pas pour exister. Et je ne vis qu’à travers cette envie. Je n’existe pas à travers cette raison. A travers ces faux semblants et cette morale des hommes. Morale qu’ils ont inventé pour justifier leur lâcheté. Car il n’existe pas plus lâche que celui qui tourne le dos à son instinct.

En dévorant son cou, en sentant à nouveau sa peau contre mes lèvres. Il n’y avait ni doute, ni questionnement. Sinon une vérité absolue. Elle était à moi. Elle le serait jusqu’à ce qu’elle quitte l’emprise de mes bras. Et bien encore, bien davantage. Si j’aimais posséder les autres. Je n’aimais pas les voir quitter mon étreinte. Jalousie mal placée que le voleur qui s’empare des biens d’autrui. Mais les trésors d’or et de diamant ne sont pas facilement abandonnés sur le chemin du plaisir. Une fois la richesse, le bonheur et les pulsions assouvies. Nul ne peut décemment se détourner d’eux. Et je n’étais qu’un homme. Qu’un homme de plus. Homme parmi les hommes. Incapable de résister à cette pulsion animale qui raisonne au creux de mes lèvres, au creux de mon torse, au creux de mes jambes.

Si je devais m’éloigner. Ce ne serait pas d’elle. Pas de son doux parfum, pas de cette odeur qui m’enivre et m’emporte. Pas de ces lèvres qui m’appellent et qui m’emprisonnent. Pas de ces caresses qui me transportent et me condamnent. Non. Les seules qui seront abandonnées. Seront la raison et la retenue. Autant d’inutiles et d’encombrantes sensations. Qui viennent brider ma vie.

Lilah…

Dans un murmure, proche de son oreille. Tandis qu’une inspiration vient à nouveau m’offrir son parfum à l’excès. Je n’avais aucune autre réponse à lui donner. Si ce n’est. Je te veux. Ici et maintenant. Il n’était pas question de se rattraper. Mais de se laisser tomber davantage. D’explorer, ensemble, jusqu'aux abîmes les plus profondes de cette folie. Se livrer entièrement à l’abysse de cette démence. S’abandonner une dernière fois dans ce trou de déraison. Pour embrasser une fois de plus nos lèvres, pour rendre grâce à la seule chose qui compte. Notre douce aliénation.

Mais voilà qu’elle fait mine de s’échapper. De prendre ses distances. Comme s’il était simple de quitter les bras de la passion. Pour mieux jouer avec mon envie. Pour flirter avec ce plaisir que nous étions incapables d’oublier. Elle alors qu’elle me frôle. Je ne vois que son départ. Sans apercevoir le jeu au creux de sa bouche.

Car plus rien d’autre n’avait d’importance. Si ce n’est ce bruit sourd qui tambourinait dans ma tête. Cet appel qui martelait mon crâne.

Prends là.

Elle est à toi.

Sans un mot, sans un bruit de plus. Sans même laisser parler à nouveau nos tentations. Voilà que je succombe une nouvelle fois à mon corps.

S’élançant vers elle. Se jetant dans son dos. Je viens dévorer son corps du bout des lèvres, morsure le long de sa nuque. Qui se mêle à la salive apportée par le tracé de ma langue sur sa peau. Et tandis que mon esprit disparaissait petit à petit. Laissant entièrement la place à l’hôte animal. Mes doigts viennent glisser le long de son corps. Viennent se perdre sur chaque partie de ce dernier. S’agrippant à ses hanches, enfermant ses poignets, jouant avec son torse, avant de descendre le long de ses jambes.

Il n’y avait plus que nous. Plus qu’eux.

Il n’y avait plus qu’elle. Je ne voulais plus qu’elle.

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Affalé dans le lit. A moitié réveillé. Le regard qui fixe un point imaginaire sur le plafond. Je n’ose bouger. Pas même un muscle. Alors que sa chaleur bien présente sur mon corps manque d’éveiller à nouveaux d’autres désirs en moi. Une fois de plus. Une fois encore. Encore et toujours. Prisonnier de cette boucle, dont je suis moi-même le premier responsable. A la fois gardien et détenu. Dont je ne saurai me détacher à présent.

Immobile donc. Je fixe le mur. De peur qu’au moindre mouvement. Le temps ne vienne à reprendre. Le temps ne vienne me la reprendre. Immobile. Le monde s’était arrêté. Le monde avait cessé de bouger. Pour moi. Pour nous. Il pouvait bien continuer sa route, pour peu que cet instant reste à jamais figé de la sorte.

Pour une fois, mon seul désir, était d’être laissé en arrière. Avec elle. Ici et maintenant. Que cette vie demeure la seule qu’il me reste à vivre. Je n’attendais rien d’autre. Et je ne demandais rien de plus. Si ce n’est cette éternité. A jamais.

Mais voilà qu’elle vient briser cet instant. Que le temps reprend et m’échappe. Que le monde nous emporte à nouveau. Qu’il l’emporte loin de moi. Car dans sa demande, ce n’était pas voix qui raisonnait au creux de ma tête. Mais celle de l’éternité. Avare, qui s’en était emparé. Me refusant le seul présent. Le seul caprice, que je ne lui avais jamais adressé.

Un long soupir rauque s’échappe de mes lèvres. Camouflant à peine la lassitude de la situation. Après tant de plaisirs, la chute n’en est que plus dure. Après un tel moment partagé. Le quotidien qui m’attendait semblait bien trop fade.

Ok… Ok. Allons-y.

A contre cœur. Je me redresse. Quittant de moi-même le contact chaud de son corps. Avant qu’il ne soit trop tard. Avant que les forces ne me quittent. Avant que ma volonté ne disparaisse à jamais. Enfilant en vitesse les habits éparpillés sur le sol de la pièce.

Tu habites où déjà ? Je veux dire. Tes parents.

Non pas que la distance était un problème pour moi. Depuis longtemps, le temps n’en était plus un. Au contraire même. C’était pour jauger le temps qu’il nous restait. Pour déterminer ce moment que nous allions encore partager.

Avant que tout ne s’achève pour de bon. Avant que tout ne disparaisse à jamais. Le temps était bien trop capricieux. Bien trop avare. Cette éternité n’avait pas assez duré. Cet instant s’était bien trop vite achevé.