Vadim avait patienté.
Longtemps.
Tellement longtemps, à vrai dire, qu’il s’était demandé si l’intérêt qu’il pensait avoir éveillé chez la Princesse, à l’aide de son attitude et de sa proposition, n’était finalement pas imaginé.
Depuis ce temps, le Chuchoteur avait vaqué à ses occupations sans faire preuve de grande insistance, quand bien même l’envie de la recontacter le brûlait.
Mais pour assurer un produit solide et convaincant, il devait se montrer tout aussi solide.
Et ne céder à aucune tentation, aucune doute, même lorsqu’il se retrouvait désemparé face à son silence.

Même le fait d’avoir écrase Meliodas Sherwood et son agent Cesar Campbell n’avait pas suffit à éteindre sa soif.
Lorsqu’il fut finalement recontacté, alors qu’il s’adonnait à une activité sportive matinale, c’est avec une excitation indescriptible qu’il pianotait sur l’écran de son Olid afin de lui répondre.
Favorablement, bien entendu.

Vadim s’était rendu au parlement de Tempelhelm, escorté par des agents de sécurité de Covent.
La manière dont le marchand s’était adressé au chauffeur était autoritaire, sans équivoque.

N’arrêtez pas le moteur. Je dois rentrer et sortir tout aussi rapidement.

Sans plus d’explication, il quitta le véhicule.

Mordred était une femme surprenante et quand bien même Tempelhelm agissait comme un terrain suffisamment neutre pour assurer sa sécurité, il ne pouvait pas se permettre d’imaginer un instant pouvoir anticiper ses réactions.
A vrai dire, sa ceinture d’équipements l’avait plutôt surpris, la dernière fois.

Vadim s’était présenté dans le salon privatisé en compagnie de la réceptionniste et avait déposé un regard intéressé à la Princesse.
Après avoir respectueusement salué son escorte, il s’était installé dans le canapé en face de la Princesse Greygardienne.

Il était vêtu d’un apparat plutôt chic mais classique : un costume couleur crème, une chemise de couleur blanche recouverte d’un gilet de même couleur que la veste et une cravate d’une teinte plus sombre.
Le désintérêt qu’elle affichait clairement pour lui l’amusait.

Bonsoir, Votre Majesté. Je vous remercie une nouvelle fois pour cette invitation. J’ai bien cru, l’espace d’un instant, n’avoir éveillé aucun sentiment de curiosité chez vous.

Affiche une mine enjouée à l’évocation de leur précédent échange.

Vous avez fait tant d’effort pour nous offrir un terrain sur lequel nous pourrions discuter d’égal à égal, je ne vous ferait pas l’affront de l’ivresse. L’embarras serait insoutenable, croyez moi. C’est parce que je suis un homme d’affaire correct que je suis un mauvais buveur.

Croise ses jambes avant de déposer ses mains contre ses genoux.

Avez-vous pris le temps de réfléchir à ma proposition, Excellence ?

Le Chuchoteur était parfaitement incapable d’affirmer si oui ou non la Princesse témoignait d’un attrait flatteur à son égard depuis leur dernière rencontre par taquinerie ou bien sincérité.
Mordred était une femme de pouvoir, rusée, qui avait su maintenir en place au pouvoir un homme comme Artorias Harcourt, qui ne brillait pas de son verbe mais bien de l’odeur de sang qu’il dégageait en toutes circonstances.

Prendre pour acquis les propos de la Princesse pourrait signer sa perte, aussi, Vadim prit la décision d’accueillir avec légèreté ses dires et de feindre l’innocence plus que la surprise.

Hantée ? C’est là aussi un bien grand mot, si vous voulez mon avis. Mais j’en suis flatté. Vous avez également occupé un espace non négligeable de mon esprit.

Parce qu’elle avait su faire preuve de poigne face à lui, dans un usage maîtrisé de son pouvoir.
Mordred parvenait à être aussi avenante qu’elle était menaçante, une première dans la carrière du commerçant.

Son regard retombe, intrigué, sur le verre qu’elle venait de se servir.
S’il voyait en ce geste l’attitude d’un monarque, il laissait fort à penser que cela n’avait pas vocation à encourager une éventuelle négociation entre eux.
Mordred était venue nourrir sa curiosité plus qu’elle n’était venue discuter de son offre.
C’était surprenant mais pas déplaisant.

Son analyse, quant à elle, était pertinente.

Une coopération de Greygarde le placerait de manière évidente à une position favorable afin de décider qui de la nation de la Gargouille ou du Scarabé sortirait vainqueur de leur affrontement.
Plus encore, il pourrait provoquer la destruction mutuelle des deux pays s’il manipulait correctement l’information.
Cela n’avait pas échappé à Mordred et plutôt que de contrarier Vadim, cela lui donnait raison sur un point.
Investir autant d’argent pour attirer l’attention de la Princesse n’avait rien d’une perte.

Ce n’était vraisemblablement pas son offre qui avait éveillé des sentiments contraires chez elle, mais bien lui, à titre personnel.
Le regard se déforme en un haussement de sourcil, sincèrement troublé.
Vadim n’avait pas imaginé la Princesse de Greygarde comme une personne capable de s’intéresser à autre chose de la pouvoir et son application.
Ne saurait dire, désormais, si l’intérêt qu’elle lui portait était une bonne ou une mauvaise chose.

Le Chuchoteur savait pratiquer avec excellence une relation commerciale avec une collaboratrice, mais il avait rapidement tendance à sombrer dans des travers qu’il dissimulait avec pudeur lorsqu’il s’agissait de s’impliquer dans un échange plus… Intime.
À sa dernière déclaration, Vadim reste figé un instant dans une mine candide.
Finalement, son visage se transforme pour prendre un air plus malicieux, sournois.

Un peu plus Vadim, un peu moins Covent.

Considérons simplement que je suis un homme avec des plans et les moyens de les concrétiser.

Penche sa tête sur le côté, le regard mué en quelque chose de plus perçant, plus intéressé.

Ce que vous dites n’est pas inexact, Princesse. Répondre favorablement à ma demande de collaboration ferait de moi, possiblement, un acteur majeur de la lutte que vous menez contre Arkmere et Dawndale. Seulement, ce n’est pas parce que vous refusez de jouer que le jeu s’arrête. En refusant de profiter de mes services, c’est un avantage que vous laissez aux deux autres nations. Mais vous avez certainement déjà songé à cet état de fait.

Vadim n’avait aucun doute quant au fait que Mordred Harcourt soi capable d’analyser la situation dans son ensemble.
Relater ce fait n’était pas non plus une menace, c’était simplement la manifestation de sa curiosité.

Qu’est-ce que Greygarde pouvait bien dissimuler en ses terres pour pouvoir se passer des services du Chuchoteur du commerce tout en laissant les nations ennemies jouir de ce privilège ?

Vous savez, Votre Majesté, ce n’était pas un mensonge lorsque j’affirmais être capable de reconnaître le pouvoir lorsqu’il se présentait face à moi. Et vous, vous êtes ce qui ressemble le plus à du pouvoir.

Le Chuchoteur se redresse, s’avance légèrement dans sa direction.

Vous n’êtes pas passive. Vous n’avez pas attendu ma venue pour vous mettre en route. Vous aussi, vous êtes une femme avec des plans. Et je me demande ce qu’ils sont. À la réflexion, peut-être que cette collaboration pourrait plus me desservir qu’autre chose. Peut-être que vous êtes capable de plus profiter de moi que je ne puisse profiter de vous.

Mordred ne paraissait pas désireuse de s’épancher davantage sur son refus ou ce que pouvait bien signifier la situation dans laquelle elle s’était mise par choix.
La Princesse n’était par ailleurs pas plus prompt à répondre aux interrogations qu’il lui adressait qu’il ne l’était à dévoiler l’étendue de son influence ou de ses plans.
Ravi n’était pas le mot qu’il aurait choisi, puisque l’activité de Covent était quelque chose de particulièrement important pour lui, mais il était effectivement rassuré de ne pas s’être empêtré davantage dans une situation qui pouvait, depuis la première fois de sa carrière, complètement le dépasser.

Son interlocutrice avait correctement identifié les ressources à la disposition de Vadim : il n’avait vraisemblablement pas besoin d’exporter des lampes de chevet depuis Dawndale jusqu’à Greygarde pour se servir son pain quotidien ou même développer ses activités.
Arrivera de toute façon un moment où l’importance de Covent surpassera ses frais et que sa rentabilité écrase jusqu’au groupe Cooper lui-même.
La raison pour laquelle Vadim avait tant insisté pour s’implanter de manière réglementaire à Greygarde, c’était en partie son attrait pour les trésors.

Et au cours de sa carrière Vadim avait conclu que pour chaque barrière difficile à franchir se dissimulait une récompense à la hauteur de l’effort.

Ce n’était pas l’entièreté de sa réponse, mais cela serait suffisant pour le moment.
Après tout, Mordred Harcourt ne s’était pas ouverte elle non plus.

J’ai appris, avec mon activité, que les plus grandes récompenses se trouvaient rarement sur les routes plates. Lorsque vous avez refusé que je m’implante en vos terres, cela a éveillé ma curiosité. Qu’est-ce qu’ils peuvent bien cacher ? Haha. Maintenant, j’ai l’impression de l’avoir entraperçu. Et je ne suis pas déçu de ce voyage.

Hausse les épaules.

Vous savez, Hakar… Hakar n’a aucun secret pour moi. A l’exception de Greygarde, bien entendu, je sais ce qu’il se passe dans chaque nation. Je pourrais vous dire à quelle heure le Sender s’est gratté les fesses pour la première fois aujourd’hui. C’est affreusement ennuyant, vous savez ? De ne plus rien découvrir.

S’enfonce à son tour dans le canapé, les bras écartés sur le dossier.

Mais de vous découvrir vous ? Ça, c’était quelque chose. J’aimerais, en revanche, revenir sur quelque chose. Je ne considère pas la quête de pouvoir exponentielle comme étant le propre des fous. J’aime le pouvoir, en réalité. J’aime l’utiliser sur les gens et j’aime quand on l’utilise sur moi. C’est grisant.

Au final, l’implication de Vadim et ses plans n’avaient qu’une seule et même finalité.
Il en allait de même pour chacun, selon lui.

Peu importe ce que je pourrais bien vous dire, votre Majesté. Qu’il s’agisse de mon plan et son déroulement dans son intégralité, il mènera forcément à toujours plus de pouvoir. Sur la population de Hakar, sur les dieux eux-mêmes. Ce n’est pas ça, votre véritable question. Vous vous fichez de ce que je veux.

De nouveau, Vadim s’avance sur le canapé.

Vous voulez simplement savoir si mon ambition entre en contradiction avec la vôtre. Vous voulez savoir si je suis du genre chien docile ou bien serpent venimeux.

Peut-être un peu des deux.

Mordred dégageait, effectivement, une forme de lassitude pour les jeux politiques.
Sa remarque sur la position qu’il avait adoptée face à elle il y a de cela deux semaines fit s’élever un rire sincère.
D’être un serpent venimeux n’entrait aucunement en contradiction avec ce qu’il avait montré jusque-là, la docilité n’avait été qu’apparente et avec un objectif précis en tête.
Si la Princesse avait déposé son regard sur la ville de toutes les légendes, Vadim quant à lui n’avait pas détourné les yeux de sa silhouette.

Mordred Harcourt apparaissait comme une femme relativement confiante et le Chuchoteur se surprit à ne plus parvenir à lui faire perdre sa constance.
L’effet de surprise s’était-il dissipé ?
Détaillait ses déplacements.
Elle était presque envoûtante.

Vadim n’avait que rarement côtoyer des personnes capables de lui faire manifester autant d’intérêt, d’attention.
Peut-être que cette place n’avait toujours été occupée que par son frère, Nemo.
Une pensée lui échappe.
Quel temps pouvait-il bien faire à Dawndale ?

Son attention se recentre sur la Princesse.

Etait-il à la hauteur de sa curiosité ?
Il n’était pas en mesure de le confirmer, n’étant pas juge de la situation.
Si elle voulait conserver une forme d’attachement pour ce qu’il représentait, Vadim avait quant à lui passer l’âge - et le niveau d’influence - pour se faire valoir au-delà de ce qu’il était vraiment.

Je suis meilleur danseur que buveur, dirons-nous.

Tout simplement parce que la danse s’avérait de temps à autre être un outil précieux afin de s’approcher d’une personnalité, lors d’une réception.
Peut-être même aurait-ce été l’approche qu’il eût adopté auprès d’elle, s’il fut dans l’incapacité d’attirer son regard avec ses marchandises.
Une réception à Tempelhelm.

Vadim avait quitté l’assise de son fauteuil pour s’approcher de Mordred.
Le teint de la Princesse était pâle.

J’ai entendu des rumeurs sur vous, Votre Majesté. On raconte que le mal dont vous avez souffert pendant plusieurs années n’avait rien d’anodin. D’aucuns s’avançaient même à dire que vous étiez… Porteuse de cette chose qui ronge notre continent.

Se serait probablement oser à effleurer sa longue et belle chevelure, s’il n’avait pas reçu l’éducation minimum.
Ce n’était, en tout cas, pas l’envie qui en manquait.

Mais il s’agit d’un mal dont on ne revient pas et vous m’avez l’air tout à fait bien portante. Toutefois, il existe en chaque rumeur une part de vérité. Alors, je me demande : seriez-vous plus Reine que votre titre ne laisse à le suggérer ?

Êtes-vous la Reine de l’Essaim ?

D’une vérité susurrée la danse s’était amorcée et, sa main dans la sienne, Vadim avait suivi les pas de son hôte avec l’habileté propre de celui qui s’était formé à ces usages.
Le Chuchoteur, à vrai dire, ne nourrissait aucune passion pour la danse, pas plus que pour l’art de manière générale, quand bien même il s’efforçait de s’en donner l’allure.

Le marchand écoute, silencieusement et patiemment, l’histoire de ce que la Princesse avait baptisé elle-même “un courroux centenaire”.
Mais Vadim n’était pas convaincu de cette histoire larmoyante.
Selon lui, la Princesse se livrait trop facilement, trop soudainement.
Comme pour les rumeurs, le mensonge gardait elle aussi une part de vérité.
Et bien malheureusement pour lui, Vadim ne connaissait pas suffisamment son interlocutrice pour savoir séparer ces deux entités dans le discours de la monarque.
Alors Vadim se contente de sourire, idiot.

Elle le taxe de superstitieux et le commerçant s’en amuse, car si elle justifiait sa maladie par un courroux centenaire découlant d’un cycle brisé, il n’était vraisemblablement pas le plus superstitieux de la pièce.
L’homme d’affaires ne se serait pas décrit lui-même avec tant de fermeté qu’un “sot s’abreuvant des commérages”, mais il se devait bien d’admettre qu’il avait l’écoute facile pour les rumeurs et les légendes.

Peut-être ressentait-il encore le besoin d’être émerveillé, à la manière d’un enfant qui n’avait lui-même jamais terminé son cycle.
Peut-être, aussi, qu’il avait besoin de voir en Mordred Harcourt autre chose que la Princesse habile d’une nation militaire hostile.
Quelque chose de plus précieux, de plus irréel.
Toujours ce même amour d’une puissance le surpassant, sans doute.

Mordred avait cessé ses pas pour plonger ses iris dans les siennes.
Vadim en fit de même.

Peut-être bien. J’ai en effet la conviction que chaque bruit a son importance et mérite qu’on lui prête une oreille. Si cela ne m’a jamais réellement desservi, je suis triste d’apprendre votre déception à mon sujet.

L’espace d’un instant le commerçant s’imaginait avoir certainement accordé plus d’importance à ce que Mordred pouvait bien représenter qu’à la femme en face de lui.
Au rythme de la musique, les pas de Vadim reprennent.
Il se fait guide.

J’imagine malgré tout avoir suffisamment de perspicacité pour savoir que vous ne parlez pas inutilement. Et je constate par la même occasion qu’évoquer votre maladie vous a incité à vous livrer plus que d’accoutumer. Un courroux centenaire, mh ? Je ne vous savais pas aussi romantique.

Le Chuchoteur n’imaginait pas Mordred Harcourt comme une femme particulièrement liée à l’influence d’Eclipse et sa religion.
Pour preuve le Dieu du chaos n’avait pas été évoqué une seule fois en deux discussions.

J’aimerais être plus superstitieux que je ne le suis réellement, Votre Majesté. Ainsi j’aurais peut-être le plaisir d’assister à autre chose qu’à des fadaises, à longueur de temps. Tristement, Mordred Harcourt, je ne m’abreuve pas de grand-chose.

Penche sa tête sur le côté, lui adresse un doux sourire.
Ce rendez-vous était non seulement réellement agréable mais la compagnie de la Princesse était, quant à elle, aussi stimulante que plaisante.
Cela lui donnait l’impression de pouvoir passer des heures en sa présence.

Lors de notre dernière discussion, vous m’avez invité à considérer ce que vous vouliez que je vous offre réellement plutôt que ce que je pensais bon de vous offrir. Alors qu’en est-il, Princesse ? Que voulez-vous réellement de moi ?

La pression des doigts contre sa peau, Vadim se laissait venir au gré de la mélodie et des expressions qui se dessinent sur le faciès.
Ou bien, au contraire, à l’absence d’émotions chez la Princesse.
Cela ne lui semblait pas factice, pourtant, et l’orgueil de Vadim se superpose à la déception lorsqu’elle annonce ne tout simplement rien attendre de lui qui ne relevait pas simplement du fantasme.
Traduis cette danse comme étant son seul caprice et, à son tour, questionne le Chuchoteur sur la raison de sa présence en ces lieux.

À Tempelhelm, l’étiquette ne le contraignait à aucune perte de temps.
En ces terres Mordred n’était pas plus Princesse qu’il n’était Chuchoteur et Vadim aurait pu, librement, quitter la pièce au moment de son refus.
En un sens, il l’avait déjà fait.
Lorsqu’il avait abandonné la candeur et les apparats pour une implication aussi prononcée que sincère.

Si cela peut vous rassurer, votre Majesté, l’homme d’affaires a déjà quitté cette pièce depuis un long moment. Je ne m’attarde pas sur des affaires perdues d’avance et s’il s’avère qu’aucune collaboration n'est envisageable entre nous deux aujourd’hui, je n’insisterais pas davantage.

Cette déclaration était, par ailleurs, tout aussi véridique que ce qu’il s’apprêtait à dire dorénavant.

Je suis resté parce que ma curiosité est sincère et qu’à votre différence je n’ai toujours pas été déçu de notre échange. Je dois aussi admettre n’avoir jamais discutaillé avec une représentante de la Maison Harcourt et cette expérience est pour le moins… Grisante. À en juger par l’attitude de votre frère, le Roi, j’avais imaginé les membres de votre famille comme étant plus féroce dans les actes que dans les mots.

Et à en juger par l’attitude et le verbe de son interlocutrice, Vadim avait fait fausse route à ce sujet.
Ce n’était pas pour lui déplaire, d’ailleurs.

Le Chuchoteur avait relâché son attention de la musique et ses pas s’étaient arrêtés.
Plonge son regard dans celui de la monarque.

A la réflexion, Mordred Harcourt, je pense être capable de faire quelques concessions. Quelle position souhaitez-vous adopter dans notre relation afin de favoriser une entente mutuelle et profitable ?

Car si Vadim ne pouvait pas simplement inviter la Princesse de Greygarde à entretenir le contact avec lui, la conclusion d’un accord entre eux serait un parfait prétexte pour s’enquérir de sa compagnie quand le cœur y était.

Il lui fallait simplement une excuse.

Vadim n’avait, finalement, pas obtenu quand chose de cet entretien.
Si ce n’est la certitude que le contrat entre Covent et Greygarde devrait se négocier d’une main de fer à l’aide de divers compromis.
Ce n’était pas pour lui déplaire, d’ailleurs, puisqu’il avait aussi obtenu la conviction que la femme en face de lui méritait autant son temps que son argent, tant sa compagnie était particulière.
Le Chuchoteur saurait prendre son mal en patience, pour le moment, comme il avait su le faire par le passé.
Ses affaires à Dawndale requerraient elles aussi toute son attention.

La Princesse lui adresse un droit de communication qu’il aurait été stupide de refuser et l’invitation à Arkmere qu’elle mentionne lui arrache un sourire gêné.
Son influence s’étendait dans tout Arkmere de manière tentaculaire mais d’infiltrer un membre de la famille Harcourt sur les terres d’Omni était un exploit que même lui serait bien incapable d’accomplir.
Une proposition à l’impossible, au fantasme, donc.

Leurs mains rompent contact et Vadim se recule d’un pas, dirige un regard intéressé sur Mordred Harcourt avant de s’en détourner pour observer l’espace d’un instant la ville de Tempelhelm.

Cette capitale était déjà le jeu de différentes intrigues politiques et commerciales, qui sait ce qui pouvait bien se négocier à ce moment même ?
Vadim en remercierait presque les deux dieux primordiaux d’avoir fait chuter pareil terrain de jeu.

Je saurais m’en montrer digne, altesse.

Penche sa tête sur le côté alors qu’il abat une dernière fois ses iris sur l’objet de sa convoitise.

J’espère que vous retrouverez sans peine votre frontière et que nous pourrons, à l’occasion, profiter de la douceur de ce salon une nouvelle fois.

Un dernier appât.

Je serais prochainement en déplacement à Dawndale afin de m’entretenir de diverses affaires. Alors, si vous avez une proposition à me faire d’ici là concernant mon projet, je serais à votre disposition. Faites bon voyage, Princesse Harcourt. Et saluez le Roi pour moi.