Et vient le temps des regrets

et vient le temps des regrets

2002 -- Terra Forma -- feat. Hadrien Steinhart

Frôlant les reliefs des murs du manoir Steinhart du bout des doigts, Delilah avançait lentement parmi les couloirs et les pièces de la demeure. D’un œil avisé et expert, elle vérifie calmement que tout est en place et que les lieux sont présentables. Parfois, elle déplace un vase pour s’assurer d’une symétrie. D’autre fois, elle frôle simplement le dossier d’un canapé en admirant la lumière qui filtre à travers les hautes fenêtres. Les lieux avaient été vidé de toute présence étrangère, et nombreuses de ses affaires avaient déjà été acheminées vers Dawndale en attendant la reconstruction de Tempelhelm.
C’était un au revoir qu’elle adressait au symbole de la Terre et de la dynastie des Steinhart, persuadée de l’avoir protégé de la destruction et de la colère de l’Understadt.

Ses pas s’arrêtèrent au centre du hall d’entrée alors que les portes s’ouvraient. Hadrien Steinhart était ponctuel.
Immobile, elle observe l’un des derniers dynastes de la Terre entrer dans sa demeure. Le dos droit, le port altier, élégante et distante, elle le laisse approcher. Si elle est aussi confiante c’est que, non loin d’elle, se tient l’homme qui avait veillé à sa sécurité durant le court règne de Némésis dans la cité. Elle lui fait d’ailleurs signe de ne pas approcher.

Elle avait fait demandé Hadrien Steinhart par l’intermédiaire de Lison Buchanan, en guise de bonne foi et d’amitié, pour apaiser les tensions.
Elle ne comptait pas sur sa pitié, bien évidemment, ni sur son pardon. Elle était la première à ne pas arriver à se pardonner les choix qu’elle avait fait. Elle ne les regrettait pas tous, mais peut-être se reprochait-elle son inaction, ou le fait qu’elle aurait pu faire plus. C’était d’ailleurs pour cela qu’elle s’employait à en réparer les conséquences : en aidant Tatiana à apporter son aide à l’Understadt, vendant son image dans les couloirs d’Elyon pour labelliser l’entreprise “Némésis” aux yeux de ces derniers, par exemple.

Et puis il y avait aujourd’hui, en rendant au dynaste l'héritage de sa famille.

- Merci d’être venu, Monsieur Steinhart. L’invitation était probablement maladroite, je ne voulais pas que cela vous paraisse être une convocation.

Marquant un temps de pause, tout en restant immobile, elle l’observe, une main posée machinalement sur son ventre.

- Je suis consciente de la colère qui doit vous animer aujourd’hui. Et je ne vous demande pas de pardonner. L’affront est trop grand. Les pertes également. Mais je suis ici pour tenter de racheter les erreurs commises. Si vous voulez bien m’écouter.

code & icons by lilie

Et vient le temps des regrets

ft. @Delilah Evans

Tes pas traversent les rues d’une ville qui t’a vu grandir. Ils tracent le chemin que tu as fait mille fois, pour te rendre à cet endroit que tu appelais « maison ». Ici, un immeuble n’aura pas été reconstruit. Là, une fontaine est un peu différente. Tempelhelm ne sera plus jamais la même, pourtant tu reconnais les efforts déployés pour la préserver. Tu les apprécies, mais tu restes amer, Hadrien, quand tu penses à tout ce qui aurait pu se passer. Pendant, après, mais surtout avant la guerre. Tout ce qui aurait pu être fait. Tout ce qui aurait pu être évité.

En arrivant aux grilles de ton manoir, ton cœur se gonfle du souvenir des tiens. Tu vois dans le jardin les premiers pas de Lionel. Tu entends le rire de Newton dans le vent, tu vois le visage de Galmor dans les pierres. Ici sur Hakar, on a pris vos noms pour n’en faire rien de plus que ceux des lambdas. Mais toi, Hadrien, tu te souviens. Steinhart est un nom qui rend fort. Qui rend fier.

Steinhart était, et il sera.

Tu observes les lourdes portes de ton chez-toi. C’est la première fois que tu viens, depuis la chute, et c’est sur la demande de Lison que tu as accepté. Dans d’autres circonstances, peut-être serais-tu venu le poing levé. Mais pour elle, tu te contentes de pousser la porte. Comme il y a des années, lorsque tu rentrais pour le dîner. Tout autour de toi, les souvenirs se chamaillent de mélancolie.

Tes yeux se posent sur Delilah Evans. Bien malgré toi, la mâchoire se contracte. Pendant que tu croupissais sous terre, pendant que les derniers de tes parents fuyaient leur vie, elle se pavanait dans tes couloirs. Elle buvait à sa propre gloire. Ton dos est encore plus droit que le sien, ton menton plus haut encore. Tu es chez toi, et elle n’est rien. Lison est la seule raison pour laquelle tu ne hurles pas. La seule raison pour laquelle tu ne brises pas son corps entre tes doigts. Maître de la Terre, qui fulmine et fulmine dans ta tête.

Tu restes immobile, tu l’écoutes tout en laissant tes yeux vagabonder alentours. Tout semble à sa place, pour le moment. Quand tu reviens à elle, tu remarques sa façon de se tenir le ventre. Mais si deviner qu’elle est enceinte marque un temps de pause dans ta colère, cela ne change rien à ton facies. Autoritaire, comme l’était celui de ton père.

- Vous ne devez ma présence et ma retenue qu’au concours de ma femme, j’espère que vous en avez conscience.

Fut un temps, Delilah Evans aurait déjà été punie sévèrement.

Maître de tes lieux, tu marques enfin un pas chez toi. C’est comme si tu pouvais ressentir l’esprit des disparus, des êtres aimés, qui s’enroulent autour de tes jambes. Tu dépasses Delilah, marche jusqu’au premier salon. Mais ce n’est pas là que tu arrêtes ton chemin, tu le continues jusqu’à la baie vitrée que tu ouvres en grand pour donner sur le jardin. Ton jardin, ce jardin. Tout au bout, au loin, tu aperçois les lignes de la crypte. Cela te donne la force et le plaisir d’inspirer. Ils sont encore tous là, quelque part avec toi. Ton grand-père, ton père, Galmor, Newton.

Tu te retournes pour lui faire face.
Les épaules te pèsent du rôle des ancêtres, celui de l’homme qui doit se tenir droit, fort. Celui qui doit juger, donner les sentences mais également, parfois, pardonner.

- Par quel subterfuge souhaitez-vous tenter de racheter vos erreurs, Mademoiselle Evans ?

Faniahh/Lala/Cyalana

et vient le temps des regrets

2002 -- Terra Forma -- feat. Hadrien Steinhart

Delilah reste silencieuse quand la voix du Steinhart résonne dans tout le superbe hall de ses ancêtres, imperturbable, mais loin de s’écraser devant lui, ses émeraudes brillaient intensément en soutenant son regard qui fulminait. Se contentant de hocher la tête, elle marque sa compréhension sans s’imposer davantage, pour l’instant, sachant pertinemment qu’elle n’avait plus à être ici, maintenant que le véritable propriétaire des lieux était revenu des entrailles de Tempelhelm.

Il s’avance, passe près d’elle, faisant tressaillir l’homme chargé de sa protection mais le regard sévère de la jeune femme lui indique de ne pas bouger.
Lison était sa carte maîtresse, son sauve-conduit. Elle avait confiance en son jugement, et en la maîtrise de l’un des derniers dynastes de la terre encore debout.

Alors, quand Hadrien se déplace pour renouer avec ce qui fut autrefois sa maison, elle le suit à bonne distance, tranquillement et sans se presser, se contentant de l’observer sans un mot, comprenant finalement quand il redécouvre le jardin.
Et quand il se tourne, un léger sourire glisse sur son visage. Il est tendre comme celui d’une mère ou d’une sœur, pourtant, elle ne cherche pas à l’amadouer avec de larmoyants discours.

- Appelez-vous l’état impeccable de ce lieu, de ces jardins, un subterfuge ? Ce serait vexer ces gens qui n’ont cessé de travailler pour la demeure Steinhart.

D’un pas lent et élégant, elle s’avance elle aussi près de la baie vitrée ouverte donnant sur les jardins.

- Lorsque l’on m’a demandé mon vœu, après la guerre, je n’avais pas besoin de maison. Bien que plus modeste que ce manoir, la maison de ma famille était amplement suffisante, luxueuse et confortable.

Delilah fixait la crypte, au loin, se remémorant ce jour où ils avaient gagné, sans qu’elle ne savoure sa victoire. Mais elle n’était pas là pour s'apitoyer sur son sort. Même maintenant, cela était impensable.

- Cette maison est le symbole d’une dynastie noble et honorable. Un pilier de Tempelhelm. Le cœur de Terra Forma. Et je crois que… Je craignais qu’il soit détruit. Alors je l’ai réclamé comme dû.

Levant les yeux vers Hadrien, elle souffle sans se parer d’artifice.

- Je sais que c’est un maigre geste, Monsieur Steinhart. Et vous n’êtes pas obligé de me croire. Mais c’était une façon de protéger l’héritage de la Terre. Lison l’a compris quand elle est venue me voir ici.

Glissant les doigts dans la poche de sa veste, elle en sort une clé. Plus un symbole qu’autre chose, la clé de la crypte. Car des clés pour ce manoir, il y en avait des dizaines. Elle les lui rendra toutes.

- Votre nom a été préservé entre ces murs. Rien n’a été détruit. Tout a été remis en ordre. Personne n’a été mis à la porte.

Elle sait bien que tout ça n’apaisera ni la colère d’Hadrien, ni sa propre culpabilité. Mais elle pourrait dormir quelques instants de plus une fois cette affaire réglée.

- Bon retour, Monsieur Steinhart.

code & icons by lilie

Rechercher

Résultats par : Messages Sujets
Recherche avancée