parfois, tu déposes genou à terre et tu penses.
tu penses ta gloire prochaine,
ton amour bientôt attrapé dans le coin d'une allée.
tu es face à ton autel, et tu y penses
((que penses-tu de toi ? mérites-tu ne serait-ce qu'une goutte d'amour ancrée dans les pétales d'une rose ? suffit-il de prier pour éviter d'être condamné ?))
à tout ce que tu pourrais avoir,
et ce que tu veux encore.
plus
toujours plus,
ce n'est jamais assez, ça brûle sur le bout de ta langue et ça écorche le bout de tes doigts, sang mêlé à la peau craquelée. ce n'est jamais assez pour toi, à l'éternel appétit, à la fringale divine. les dieux festoient autour d'un immense banquet, alors pourquoi pas toi, le fils des cieux ? mérites-tu les éloges que ton propre esprit manipule ? tu as besoin de la moindre miette d'amour, d'amitié, des mots doux comme les baies de sureau et acidulés comme un pamplemousse. tu cherches, désespérément, ce qui te fera prendre le large, ou prendre le ciel tel Icare se rapprochant peu à peu du brûlant soleil. au final, toi aussi, tu brûles.
tu n'es qu'un élément d'eau, après tout.
tu n'es pas aussi habile, fort, et énergétique de ces fameux signes de feu.
non pas que l'eau ne puisse pas ressentir des vagues émotions de colère. au contraire. les ras de marée, les tsunamis, les pluies torrentielles — tout ça, ça fait parti de toi, tornade mélangée aux larmes des dieux du firmament.
aujourd'hui, tu t'es remis à prier. c'était ton job, après tout, de veiller à la sûreté et aux bons déroulements du temple. tu n'étais rien qu'un prêtre, pas un gardien. tu te retrouvais souvent à faire des pauses, déliant tes mains, à jouer avec l'eau de la fontaine en manipulant sa forme. l'eau était si malléable. intangible, mais facile à manipuler. fragile, mais forte à la fois. un peu comme toi.
tu entendis des bruits de pas résonner, le son se cognant aux courbes du temple. le moindre de bruit se faisait lourdement entendre, et aucun n'échappait à ton ouïe fine. une colère froide t'enveloppa.
qui était-ce, qui venait déranger tes prières ? tu te retournas, ton visage froncé redevant lisse, sourire jusqu'aux oreilles, les yeux à demi-fermés. tu le connaissais, le réprouvé. celui qui ne valait rien, dont l'existence n'était que chemins montagneux, avec des pics et des bosses à perte de vue. tu gardais tes mains jointes. alma te connaissait depuis ta bénédiction au saint scorpion. il te suivait à la trace, rêvant d'être un minuscule petit être attiré par ton ombre. il ne valait pas grand chose, ce petit homme. moins que toi, en tout cas.
il y avait
quelque chose que tu voulais détruire, dans son visage
de l'espoir
l'espoir d'être aimé à sa juste valeuret ça te rendait malade.c'est toi qui mérite l'amour du peuple, des hauts gradés. lui, ne méritait que la boue et les basses besognes. mais peut-être que faire semblant d'aider un petit réprouvé ne ferait que faire monter ta cote. sans doute. tu faisais de ton mieux pour garder ta haine clouée à l'intérieur de tes muqueuses et de ta chair. scorpion te susurrait dans les oreilles — était-ce même scorpion ? tu ne sais plus où en donner de la tête — de
l'utiliser jusqu'à ce que le potentiel de ce garçon naïf tombe à sec, et qu'il comprenne enfin ta vraie nature. celle d'un
affamé.— que me vaut ton honneur ? il y a un moment que je ne t'avais point vu, mais remarque, tu es si petit que ce ne serait pas surprenant qu'on t'oublie. du venin entourait ta langue, et formait tes mots. tu n'étais pas là pour le prendre avec des pincettes. au contraire.