Il regardait vaguement Caïn l'horizon à sa fenêtre, cigarette presque terminée en main, plongé dans ses pensées
ne parvenant à se concentrer sur quoique ce soit, soudainement
hanté par des pensées parasites qu'il préférait refouler mais aujourd'hui
aujourd'hui elles revenaient sans cesse a la charge sans qu'il ne puisse l'expliquer
– peut être était-ce seulement un de ces mauvais jours où l'on a seulement le droit de repasser les erreurs-
non les péchés du passé qui ne le bouffent le consument et dont même la mort ne réussira à l'en libérer

Soupire et écrase sa cigarette avant de quitter son bureau, arpentant les couloirs, seulement annoncé par le bruit de ses talons, en quête d'un peu de paix,
– qu'il peinait bien trop à trouver
il restait encore un peu de temps avant le prochain conseil et Caïn souhaitait simplement s'aérer l'esprit, embrumé par des résidus de pensées indésirables
et sans qu'il ne s'en rende compte ses pas le portent déjà vers la salle du conseil
Un court instant observe la porte fermée avant de hausser les épaules – il ne perdait rien à entrer dans la salle un peu en avance, non ?
sans plus de réflexion pousse la porte et pénètre dans la salle, laissant les portes se refermer derrière lui, se souciant peu de son environnement – aussi met-il du temps
à te remarquer, aussi discret et taciturne que d'habitude, même pendant les conseils – à se demander si tu savais parler, parfois
Oh quand il te remarque pardonnez-moi, votre Altesse, je ne souhaitais pas vous déranger
s'excuse-t-il, te tournant le dos tout aussi vite qu'il était entré et s'apprêtant à partir

A peine le temps de faire un pas que le piège se referme
que ta voix tonne dans la pièce, le faisant sursauter
que tes mots résonnent et glacent son sang font s'arrêter son cœur le temps d'une seconde
doucement se retourne vers toi, une expression entre incompréhension et inquiétude
je sais ce que vous avez fait
l'effroi au cœur la respiration se coupe et le temps se suspend dans cette tension insoutenable qu'un long silence entretenait
Ce... que j'ai fait ? demande-t-il, peu assuré que voulez-vous dire ?
alors que dans son esprit les pensées défilent et s'attardent sur bien des choses
excluant d'office son plus grand secret, celui qui l'avait fait descendre la pente des enfers et amènera sa damnation dans le monde des mortels
parce que tu n'avais aucun moyen de le savoir, aucun moyen de n'en serait-ce que d'entendre une rumeur à ce sujet tant il s'était démené pour emporter son plus lourd péché dans sa tombe et tuer l'inavouable avec lui
pas vrai ?

le silence, seulement la torture de l'attente à la recherche du péché commis quand
abel constance highblade
l'air qui se gèle et le temps qui s'arrête alors que Caïn n'entend plus que le sang pulser de plus en plus douloureusement dans ses veines incapable de faire le moindre geste comme s'il allait invoquer la peste s'il osait faire le moindre geste
non
non non
non non non non non non non non
non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non
il aurait tout accepté d'entendre
tout, même les caprices les plus enfantins
même les insultes les plus viles
même la colère la plus terrible du roi
mais ça
ça
Ç A
un nom qu'il gardait pour lui
que personne n'était censé prononcer pas même lui ;
alors que tu oses le prononcer en entier
oses éveiller les tourments incontrôlable qu'il ne parvenait à tarir
était comme un blasphème à ses oreilles

Saluez votre frère
il étouffe Caïn, ne parvenant à respirer comme si une seule d'elle suffirait à faire sortir le diable des enfers
– non, il était déjà sorti et il se moquait de lui en invoquant les défunts devant lui
il venait simplement de faire tomber son masque innocent et avait sorti ses griffes qu'il agitait juste devant ses yeux
Qu'est-ce que...
parvient-il à articuler
mais il avait la gorge si sèche les maux si ardents qui embrouillaient ses pensées il
n'était plus qu'un amas de douleur et de terreur la façade s'était effondrée en laissant son crime exposé au monde ah
tous ces jeux de grandeurs de voix hurlante d'intimidation pour si peu quand il suffisait de quelques mots pour le faire vaciller au bord de l'abîme
le contrôle sur la vérité lui échappe et la voilà aussi nue qu'un nouveau né et brandie en trophée

Qu'est-ce que vous savez ?
s'ose-t-il encore, sur la défensive
mais pourquoi Uther, pourquoi
pourquoi ressortais-tu soudain les secrets qui auraient mieux fait de rester enterrés ?
comment l'avais-tu su malgré tous ses efforts pour tout effacer ?
mais rien ne sort si ce n'est la quintessence de toutes ces questions
à quoi tu joues ?

Dans le silence railleur tu t'approches, menace aux secrets enterrés
les murs eux-même semblaient se moquer de cette scène pathétique où celui qui se pensait en sécurité pour peu qu'il se taise – ah quel dommage alors
quel dommage que les plus puissants obtiennent toujours ce qu'ils veulent, même les secrets les plus morbides
qu'à eux rien ne peut être caché et ah Caïn qu'il avait été si
naïf de penser qu'il pourrait dissimuler le pire des crimes jusqu'à ce que son heure vienne
– mais à la fin les menteurs perdent toujours et crèvent des illusions qu'ils ont eux-même créés

Lentement Caïn tente de reprendre le contrôle sur lui-même à défaut de la situation – aurait-il su que tu agiterais ses tourments ainsi sous son nez
il n'aurait pas exposé ainsi ses faiblesse, annihilé en si peu de mots cette façade qu'il avait mit tant de temps à construire
t'observant t’approcher, crispé, n'osant presque respirer et pourtant dans le fond du regard il espérait encore Caïn
il espérait encore qu'il se méprenait sur ton savoir car avec un peu de chance tu ne parlera pas de son fratricide
tu évoqueras autre chose que son crime innommable que seul les impies oseraient
ose espérer encore Caïn quand tous ses faits et gestes hurlaient à la faute inavouable
(alors que sa raison s'était résignée et attendait la sentence inévitable)

Tu sais Uther, il y avait une différence entre constater soi-même ses fautes
et se les faire réciter impitoyablement, le forçant à faire face à ses actes car
c'est comme si tu venais de l'assassiner aussi sauvagement que lui avait arraché la vie de son frère
comme si finalement tu avais porté le coup de grâce et achevé de le torturer pour l'éternité car maintenant
il sera à jamais hanté par ses péchés
Alors que son cœur se serre que son poing se crispe inconsciemment à en faire blanchir les jointures dans son dos se mordant la lèvre
...
Non, votre altesse
je m'en souviens encore trop bien, comme si elle venait d'arriver à l'instant
le coeur au bord des lèvres peinant à articuler ses pensées implicitement se reconnaît coupable aux yeux du juge et plus devant lui-même
se faisant violence pour ne pas céder aux pulsions dévastatrices qui montaient en son être
et dans son regard ce n'est plus la peur seule qui règne mais la rage et les dilemmes qui s'entrechoquent les uns après les autres
il aurait pu mentir mais à quoi bon ? la vérité ainsi dévoilée ne pouvait être dissimulée à celui qui venait de la découvrir
encore moins les sentiments qu'elle renfermait

Néanmoins il a un temps d'hésitation, Caïn
déchiré entre ce qu'il devait dire ou faire – définitivement s'avouer vaincu dans la misère, incapable de faire face aux actes révélés
ou s'enfoncer dans une fierté mal placée et pathétique jusqu'à la fin par pur égo ?
Un court instant il ferme les yeux, Caïn, inspirant, et finalement
rouvre ses yeux ambrés qu'il pose sur toi – avouant douloureusement sa défaite cuisante dans un jeu qu'il n'avait jamais maîtrisé depuis le début
Si vous souhaitez me châtier à ce propos ; faites-le
je me plierai à votre volonté, à vos désirs et
j'accepterai mon destin, même s'il doit se finir aujourd'hui
Même dans les situations les plus délicates, même au coeur de la tempête, alors même que ses émotions menaçaient d'exploser
Caïn refusait de t'implorer, de se mettre à genoux, de s'accrocher à tes vêtements et de te supplier de lui laisser la vie sauve le visage en larmes, non
Caïn était bien trop fier pour s'abaisser à de telles choses alors
tant pis s'il ne pouvait poursuivre ses ambitions à l'issue de cette discussion tant pis si tout devait finir aussi pathétiquement
il mourra la tête haute, le regard droit (mais le cœur si vide et plein de regrets)

Sa mâchoire se serre à l'évocation du pire – à l'idée que le roi apprenne ce qu'il avait fait
ses lèvres s’entrouvrent comme pour protester
que c'était son frère lui-même qui l'avait forcé, que ce n'était pas un assassinat mais un meurtre commis sous la précipitation
(et il se remémore douloureusement son frère se jetant sur lui dans l'espoir d'abréger ses souffrances)
mais il se fige en se rendant compte bien vite de la vacuité de ses arguments car
les détails étaient bien peu important face à la lourdeur des faits et finalement
malgré tout, c'est comme s'il l'avait assassiné de sang-froid
Alors il se tait Caïn, parce qu'il n'a rien à dire
(parce que les assassins n'ont pas leur mot à dire face aux juges ;
pas quand leur vie en dépendait)

Tu t'approches de lui, victorieux et arrogant, comme portant déjà le coup fatal à son ego – pas même soulagé d'avoir la vie sauve pour l'instant ;
tu avais gagné et ça l'énervait, mais ce qui l'enrageait le plus
c'était qu'il ne pouvait pas se débarrasser de toi
bien trop dangereux bien trop puissant, en possession de secrets qui auraient dus rester avec les morts
– qu'il rejoindra au moindre faux pas
Ta main le force à se courber et à son oreille fait couler ton venin
s'impose roi dans son propre mensonge à défaut de l'être dans la réalité
exige une loyauté différente de celle qu'il avait jurée depuis toujours car celle-ci
était une chaîne à son cou dont il ne pouvait se défaire
une lame à son cou prête à le trancher, au bon vouloir des caprices de son propriétaire
(à jamais entre tes griffes)
... Bien sûr, votre altesse à peine parlé, presque chuchoté, entre deux souffles courts
la colère enchaînée au coeur et la rage dans le regard
autant contre lui-même que contre toi, en venant même à te maudire toi et ton pouvoir trop grand

Ta poigne se desserre et Caïn se fait violence pour ne pas rejeter sa main et alors que qu'il relève la tête à ton ordre
il voit ton rictus moqueur sur tes lèvres, ta satisfaction évidente de détenir du pouvoir sur quelqu'un
et c'est alors qu'il se permet de rêver pour la seule et unique fois d'un jour pouvoir lever la main sur un membre de la famille royale
de pouvoir t'écraser, te soumettre à ses pieds comme tu le faisais avec lui comme il rêve de le faire avec le monde
(et Uther, la vengeance, dit-on, est un plat qui se mange froid)
Avez-vous peur à ce point que je me retourne contre la couronne ?
ou était-ce par simple envie de pouvoir ?
Qu'importe, finalement
il ne te remerciera pas de le laisser vivre encore un peu
il ne refera pas l'erreur de t'ignorer ou de te sous-estimer
(pas la prochaine fois)

Dans tes yeux il le voit, cet éclat malsain avide de pouvoir
cette lueur qui se fichait bien en réalité des états d'âme et donnerait tout pour un peu de domination et peut-être
peut-être que c'était ça, la réelle raison qui se cachait derrière toute cette scène misérable où il se retrouvait soudainement pantin
que s'assurer de sa loyauté n'était finalement qu'un prétexte pour tes petits jeux – que tout ce que tu voulais finalement s'était te délecter d'avoir quelqu'un à ta merci
de manipuler quelqu'un à ta guise sans craindre la moindre conséquence

Et quand il le réalise Caïn, que tes mots viennent peu à peu corroborer ses craintes
sa rage ne fait que s'accroître, nourrie par son impuissance
ne sachant vraiment à qui il devait s'en prendre le plus : à toi ou à lui-même ? ou à même à son imbécile de frère – finalement n'était-ce pas sa faute aussi, toute cette situation, puisqu'il l'avait forcé à commettre l’irréparable ?
((non c'était la sienne c'était lui qui l'avait tué c'était lui qui l'avait écouté c'était lui qui avait porté le coup fatal c'était sa faute c'était sa faute c'était sa faute c'était sa faute c'était sa faute c'était sa faute sa faute sa faute sa faute sa faute sa faute sa faute))

Bien sûr que tu n'avais jamais crains trahison de sa part – ce n'était pas même une possibilité en ce monde, qu'une simple menace inexistante
alors dans le silence pesant vous vous dévisagez comme vous jaugeant
et dans ce silence – puisse-t-il être témoin – il jure Caïn de ne jamais s'écraser face à toi, de rester droit quoiqu'il arrive même s'il devait agoniser à même le sol
(il n'implorera pas ton pardon ni ne suppliera d'achever ses souffrances quand bien même il agoniserait au sol sous tes pieds)
Son regard un court moment suis ton index et il ne peut s'empêcher de claquer sa langue contre son palais au sous-entendu
A la couronne, oui dit-il simplement en relevant le regard vers toi, sans plus expliciter le propos sous-jacent
(malgré ses chaînes il ne s'agenouillera pas devant toi
préfèrera te cracher sur les pieds plutôt que de te les lécher si tu lui demandes)
Mais vous avez-vous même avoué que ce qui vous intéressait le plus, c'était une loyauté plus... personnelle qu'il ne t’octroyait que de mauvaise grâce
uniquement parce que c'est toi qui tenait la laisse – et ce n'était pas ça qui allait le retenir de grogner

Entendre le terme qu'il n'avait osé prononcer lui-même, préférant se cacher derrière des euphémismes
– et ne serait-ce qu'entendre le réel terme (soumission), celui qu'il n'avait osé dire, de ta bouche l'enrageait encore et toujours plus, serrant la mâchoire à sa mention
(peut-être que le pire était qu'il ne pouvait rien y faire
qu'il n'avait d'autre choix que de subir tes caprices)

Tu t'approches une nouvelle fois pour cette fois poser tes doigts sur son menton et encore
le forcer à se courber devant toi et encore
n'a d'autres choix que de se contrôler pour ne pas faire un geste qu'il regrettera assurément, pour ne pas te repousser brutalement
(surtout dans cette situation)
Encore obligé de subir ton poison, encore et encore mais pas une seconde ne décroche son regard du sien car il l'a promis il ne baissera pas les yeux
Caïn tente de prendre sur lui à la mention de son frère, de son agonie qui aurait duré éternellement
Laissez-le reposer en paix maugrée-t-il tout de même
ne supportant pas que tu puisses ne serait-ce que l'évoquer quand lui-même se l'interdisait
– car la seule chose que tu feras, c'est souiller sa mémoire pour le manipuler

La pression sur sa mâchoire s'accentue
ta main libre qui se pose sur sa joue comme un affront une humiliation, lui rappeler sa place nouvelle
(à ses pieds avais-tu dit, mais lui, il te le jure
il te faudra employer la force si tu le désirais réellement)
et quand tout se relâche il se redresse tout aussi vide, ouragan dans les yeux
il ne dira rien car les mots sont bien superflus quand son attitude veut déjà tout dire
broie mes os jusqu'aux derniers si tu veux
fais-moi agoniser jusqu'à en perdre la raison si tu le désires
tu ne m'arracheras pas ma fierté et ma dignité
tu peux toujours crever pour me faire aboyer à tes pieds